Maison bois-beton Aubervilliers

Maison bois-béton à Aubervilliers : anatomie d’un projet hybride et numérique

Dans la proche banlieue nord de Paris, un pavillon des années 1930 vient d’être transformé en une maison de 220 m² exemplaire sur le plan environnemental. Cette opération illustre la nouvelle tendance francilienne : densifier l’existant tout en réduisant l’empreinte carbone. L’équipe de maîtrise d’œuvre a misé sur une structure mixte bois-béton, épaulée par un logiciel pour la conception capable de générer à la fois les plans de coupe, les rendus 3D et l’intégralité du dossier de permis.

1. Un contexte urbain contraint

Le projet se niche dans une rue étroite d’Aubervilliers où la hauteur faîtage ne doit pas dépasser huit mètres. Au lieu de surélever brutalement, les architectes ont opté pour un agrandissement en profondeur : l’empreinte au sol reste quasi inchangée, mais l’intérieur passe de 80 m² à 220 m² utiles. Ce travail de précision s’appuie sur une maquette numérique qui a permis de caler toutes les altimétries sans heurter le gabarit réglementaire.

2. Alliance bois-béton : performance et inertie

       Ossature et planchers en CLT (bois lamellé croisé) : légers, préfabriqués et porteurs sur grandes portées, ils réduisent la durée de chantier.

       Socle béton existant renforcé : il assure la reprise des charges et l’inertie thermique, notamment pour les nuits d’été.

       Interface optimisée : un isolant biosourcé en fibre de bois assure la continuité thermique entre les deux matériaux, limitant les ponts.

Le résultat : un indice carbone de 430 kg CO₂ éq/m², inférieur de 25 % au seuil individuel fixé par la RE2020 pour 2029. La consommation énergétique projetée s’établit à 39 kWh/m².an, soit bien en dessous de la moyenne des maisons franciliennes neuves (environ 55 kWh/m².an).

3. Plans de coupe : colonne vertébrale de la conception

Dès l’esquisse, l’équipe a produit une série de coupes longitudinales et transversales :

       position exacte des dalles CLT (120 mm) et du radier béton (200 mm) ;

       repérage du vide sur séjour double-hauteur ;

       affichage des hauteurs sous plafond (2,90 m au RDC, 3,80 m au niveau du séjour).

Ces documents ont servi de base aux études thermiques et aux notes de calcul structure bois. En phase chantier, ils ont guidé le découpeur CNC chargé d’usiner les panneaux CLT, réduisant les tolérances à ±2 mm.

4. Rendus 3D : catalyseurs de décision

Les volumes intérieurs — lambris de CLT laissés bruts, cadres aluminium noirs, puits de lumière — ont d’abord été validés grâce à des perspectives photo-réalistes. Ces images ont rempli trois fonctions :

  1. Convaincre les riverains lors de la consultation préalable : les vues démontraient qu’aucun vis-à-vis direct n’était créé.

  2. Tester l’éclairage naturel : une simulation horaire sur 365 jours a montré un niveau moyen de 300 lux dans le séjour sans recours à l’éclairage artificiel en journée.

  3. Ajuster la teinte des finitions : le chêne huilé a été préféré au mélèze après comparaison virtuelle de l’ambiance.

5. Un logiciel au cœur du workflow

Toute la production graphique a été centralisée vers un logiciel pour la conception de maisons qui permet de réaliser des :

       Plans de niveaux, coupes, façades : générés automatiquement à partir du tracé du plan et du modèle 3D.

       Rendus haute définition : calculés nativement via le logiciel et mis à jour à la demande après chaque modification du projet.

Selon la documentation technique de l’éditeur français, un dossier de permis individuel complet peut être monté en moins de deux heures dès lors que la maquette est finalisée. Ce gain de productivité a permis de déposer le projet en avance de trois semaines sur le calendrier initial.

6. Dossier de permis : zéro pièce manquante

Le service urbanisme a validé le permis en sept semaines sans aucune demande de complément. Les raisons :

       Cohérence des pièces : toutes issues de la même maquette, donc parfaitement concordantes.

       Lecture facilitée : les coupes illustrent clairement le respect du prospect et du gabarit.

       Notice environnementale argumentée : elle détaille le gain carbone et les choix biosourcés, répondant aux attentes des services instructeurs.

7. Mise en œuvre : un chantier séquencé

  1. Renforcement du radier : coulage de plots béton supplémentaires pour reprendre les nouvelles charges.

  2. Pose des panneaux CLT : vingt-huit éléments pré-usinés posés en dix jours, hors d’eau hors d’air.

  3. Isolation et second œuvre : ouate de cellulose soufflée, pare-vapeur hygro-régulant, finitions en enduit terre sur les murs Nord.

Le suivi a utilisé les exports IFC issus du logiciel, ce qui a réduit les écarts entre étude et chantier à moins de 1 %.

8. Expérience au quotidien : flexibilité et confort

Après six mois d’occupation, les mesures montrent :

       Température intérieure : 23-24 °C en période caniculaire sans climatisation, grâce à l’inertie du socle béton et au déphasage du CLT.

       Qualité de l’air : taux de CO₂ moyen de 900 ppm, en deçà de la valeur cible (1 000 ppm) grâce à une ventilation double flux.

       Adaptabilité : le plateau haut reste modulable ; un studio indépendant peut être créé sans toucher à la structure, l’ossature bois acceptant aisément de nouvelles cloisons légères.

Conclusion

La maison bois-béton d’Aubervilliers prouve qu’il est possible de réinventer un pavillon de banlieue sans sacrifier ni performance ni esthétique. En misant sur l’hybridation des matériaux et sur un processus documentaire piloté par un logiciel pour la conception, l’équipe a :

       devancé les exigences carbone de la RE2020,

       réduit de moitié la durée chantier par rapport à une solution traditionnelle,

       obtenu un permis de construire sans aucune réserve,

       offert aux habitants un confort thermique remarquable.

Au-delà de la prouesse architecturale, c’est donc tout le workflow – de la première coupe au D.A.C.T. – qui constitue ici un démonstrateur pour la rénovation ambitieuse des tissus pavillonnaires en Île-de-France.